Papa Macron, trop négligent

Suite aux révoltes urbaines après la mort de Nahel, Emmanuel Macron a joué la carte du paternalisme, blâmant les parents. Lequel fait nonobstant montre d’un laxisme sans limites pour ce qui est des transgressions des personnages dont il a la charge.

Sébastien Fontenelle  • 4 juillet 2023
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Papa Macron, trop négligent
Emmanuel Macron, lors d'une réunion publique avec des habitants d'un gymnase du quartier de La Busserine lors d'une visite à Marseille, le 26 juin 2023.
© LUDOVIC MARIN / POOL / AFP.

Au matin du troisième jour du soulèvement consécutif à l’exécution d’un adolescent de 17 ans par un policier, Emmanuel Macron, chef de l’État français, constatant qu’il allait sans doute avoir un peu de mal à livrer dans les temps l’« apaisement » qu’il avait promis deux mois plus tôt, a produit ce tweet : « Un tiers des personnes interpellées la nuit dernière sont des jeunes, parfois très jeunes. J’appelle les parents à la responsabilité. » Son ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, en a lui aussi appelé à la « responsabilité » pénale et morale des parents, exigeant qu’ils « tiennent leurs gosses ». Puis il a promis, comme l’a relevé Franceinfo, une réponse judiciaire « rapide, ferme et systématique » à l’encontre de ces jeunes – parfois très jeunes – « auteurs de violences urbaines », mais aussi « de leurs parents ».

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Et bien sûr on pourrait – c’est tentant – se contenter ici de moquer ce paternalisme discrètement halluciné, où des gens qui se présentent à longueur de temps comme des politiciens réfléchis (et, justement, responsables) se défaussent si vilement de leurs manquements à leurs propres obligations – comme celle d’en finir avec les violences policières. Mais la vérité oblige à reconnaître qu’il y a effectivement des parents qui font parfois montre, lorsqu’ils se trouvent confrontés aux transgressions des petits – et parfois très petits – personnages dont ils ont la charge, d’un laxisme un peu exaspérant, et qu’il arrive même que ces ascendants excessivement latitudinaires (1) abdiquent tout à fait leur responsabilité pénale et morale : c’est le cas, notamment, de Papa Macron.

1

Si tu veux adhérer à la Ligue pour la réhabilitation des mots trop inusités (LRMI), écris-moi, il me reste des cartes.

La place manque ici (2) pour dresser une liste exhaustive de toutes les complaisances de ce père négligent – mais relevons tout de même quelques cas symptomatiques. Par exemple, quand le petit Éric (Dupond-Moretti, ministre de la Justice) s’est tout récemment fait gauler pour « prises illégales d’intérêts » par la Cour de justice de la République – laquelle, par une réponse pénale rapide et ferme, lui a même collé un procès –, Papa Macron, loin de le gourmander (comme l’aurait bien sûr fait un parent responsable), lui a tout au contraire assuré qu’il pourrait continuer à admonester d’abondance les mauvais parents des quartiers populaires – lààà, lààà, sèche tes larmes, n’oublie jamais que ton papa ne laissera personne t’embêter.

2

Dans le carcan étouffant de ces 3 000 signes dont l’ONU demande vainement le doublement depuis quinze ans.

Itou : quand le petit Alexis (Kohler, secrétaire général de l’Élysée) a été mis en examen pour « prise illégale d’intérêts » – laquelle semble donc être une marotte chez certains (et parfois très jeunes) macronistes –, Papa Macron, bondissant à pieds joints sur sa responsabilité parentale, lui a tout de suite signifié que ce n’était pas grave du tout, et qu’il pouvait absolument continuer à jouer dans les couloirs de l’Élysée – lààà, lààà, oublie ces méchant·es juges. Est-ce qu’il ne serait pas temps, après lui avoir concédé tant de droits, que nous rappelions ce si désinvolte personnage à ses devoirs ?

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De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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