Pureté racinienne

Une belle mise en scène géométrique de Phèdre par Renaud-Marie Leblanc.

Gilles Costaz  • 19 novembre 2009 abonné·es

Pour Phèdre, de Racine, Olivier Thomas a conçu un décor géométrique et blanc : les lignes de la perspective classique s’y dessinent ou disparaissent suivant l’éclairage. Les acteurs y entrent en costume blanc et gris – gris sombre quand la tenue tient de l’armure pinçant le corps des hommes. La mise en scène de Renaud-Marie Leblanc s’appuie sur cet univers un brin clinique et y fera même apparaître un aquarium un peu glauque. Mais le spectacle n’y adopte pas un ton glacé ni un rythme alangui. La fureur s’y déploie vite avec rigueur. La passion est palpable chez ces êtres souvent hiératiques mais jamais solennels, toujours charnels ; les corps se rappellent leurs émotions passées comme lorsque, dans le dernier acte, Thésée et ­Phèdre s’étreignent malgré eux après la mort d’Hippolyte.
Ce qu’on aime ici, c’est que la violence est à la fois déchirante et belle, jamais gratuite, parfois en suspens. Le metteur en scène s’est autorisé un personnage inquiétant, la tête mangée par des cheveux proliférants, mais c’est un clin d’œil à un certain cinéma. Il y a un style qui est celui de la tragédie incantatoire, au lyrisme régulièrement brisé par le surgissement des douleurs immédiates.
Entourée d’excellents acteurs comme Olivier Barrère, Francine Bergé, Véronique Maillard, Perrine Tourneux, Fabrice Michel et Jan Peters (un peu frêle, son Hippolyte, quand même), l’interprète du rôle-titre est Roxane Borgna, grande Phèdre parmi les nombreuses Phèdre de notre temps, intense dans la vivacité comme dans l’immobilité.

Culture
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