Un plan vert pâle

La moitié des investissements d’avenir devaient aller à l’écologie. On en est loin.

Politis  • 18 juillet 2013 abonné·es

On a beau triturer les chiffres dans tous les sens, pas moyen de donner raison au Premier ministre : sur les 12 milliards d’euros de son plan d’investissements d’avenir, annoncé le 9 juillet, seuls 2,3 milliards sont affectés à « la transition énergétique, à la rénovation thermique et à la ville de demain ». En ajoutant 1,7 milliard prévu pour l’industrie « durable » – bien qu’aucun critère n’ait été précisé –, un tiers des projets seraient « verts », et non 50 %, comme annoncé.

Pour défendre l’engagement de consacrer « plus de la moitié des investissements, directement ou indirectement, à la transition écologique », le Premier ministre indique qu’ils seront soumis à des critères « d’écoconditionnalité ». Là encore, toute la portée de l’annonce réside dans la qualité des exigences présentées dans les appels d’offres, négociation renvoyée à la rentrée. Au bout du compte, ce plan est bien faible au regard des enjeux écologiques. Les associations, telle la Fondation Nicolas-Hulot, relèvent l’effort mais se montrent globalement circonspectes. Delphine Batho, limogée début juillet de son poste de ministre de l’Écologie pour avoir critiqué le budget 2014, s’est fait un plaisir de souligner que le compte n’y est pas. Europe Écologie-Les Verts montre en revanche plus d’enthousiasme, saluant des « annonces fortes » et exprimant son soulagement : « Nous revenons de loin », souligne un communiqué. Pascal Durand, secrétaire national d’EELV, va jusqu’à parler de « vraie rupture et d’un début de transition ».

Une manière de saluer un signe d’apaisement de la part de Jean-Marc Ayrault, après les remous provoqués par l’affaire Batho. La mention « d’écoconditionnalité », dont se félicitent les cadres écologistes, a d’ailleurs été ajoutée in extremis au plan. Le Premier ministre ne l’ignore pas, l’université d’été d’EELV, à la fin du mois d’août, sera en partie consacrée au bilan d’une année de participation gouvernementale des écologistes. Par ailleurs, d’autres signes laissent douter de la sincérité de Jean-Marc Ayrault –  « l’écologie n’est pas une variable d’ajustement ». Avec son plan, il a annoncé avoir tranché pour le « scénario 2 » du rapport Duron (suite à la commission Mobilité 21), qui prévoit la réalisation prochaine de huit tronçons autoroutiers (au lieu d’un dans le scénario 1). Et si les écologistes saluent la priorité donnée à la rénovation, au chapitre ferroviaire (report des coûteuses nouvelles lignes à grande vitesse, à l’exception de Bordeaux-Toulouse), ils ont déclenché en Rhône-Alpes une bronca face au flou entretenu concernant le projet très controversé de ligne Lyon-Turin. Pas un mot pour signaler un report, pourtant clairement souhaité par le rapport Duron (qu’Ayrault a déclaré endosser totalement), c’est donc qu’il pourrait démarrer bientôt, « protégé » par l’accord qui lie la France et l’Italie [^2]. De même, silence complet sur l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, considéré comme « engagé » et donc hors débats…

[^2]: Voir l’article de Thierry Brun : www.politis.fr/Lyon-Turin-vers-un-investissement,23015.html

Écologie
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