Pénurie de pilules abortives : menace sur l’IVG

L’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament et le Planning familial tirent la sonnette d’alarme sur les soucis d’approvisionnement de traitements abortifs à base de mifépristone et misoprostol et alertent pouvoirs publics et parlementaires.

Guillaume Deleurence  • 17 avril 2023
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Pénurie de pilules abortives : menace sur l’IVG
© Christine Sandu / Unsplash.

L’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament (Otmeds) tire la sonnette d’alarme sur les soucis de disponibilité de la molécule misoprostol, utilisée pour les avortements médicamenteux.

« Malgré cette réalité de terrain, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) indiquait le 5 mars dernier sur son site une remise à disposition de ce médicament à partir du vendredi 23 septembre 2022. Aujourd’hui, le jeudi 13 avril 2023, l’agence a effectué une modification sur son site indiquant la date ‘prévue de remise à disposition’ fin avril. »

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Pour l’organisme indépendant, que nous avions interrogé récemment, les acteurs de terrain n’ont, comme de coutume, pas été entendus. « Nous avons alerté sur cette situation dès le 5 mars, avons exposé le problème le 7 avril lors de notre audition au Sénat et publié une tribune qui aborde notamment ces problèmes de disponibilité qui remettent clairement en cause le droit à l’avortement alors que sa constitutionnalisation est au cœur des débats. Que vaut un principe constitutionnel si un gouvernement n’agit pas pour qu’il soit effectif et opérationnel ? »

Entrave

Le Planning familial fait partie des acteurs qui ont remonté les soucis d’approvisionnement : ses antennes indiquent être confrontées « depuis plusieurs semaines à des difficultés d’approvisionnement en pilules abortives type mifépristone et misoprostol« , a indiqué Sarah Durocher, la présidente de l’organisation à Libération.

Pour elle, cette situation constitue « une entrave pour les personnes qui veulent avorter. La loi française prévoit que toute personne qui souhaite avorter puisse avoir le choix de la méthode (en fonction des délais), or aujourd’hui ce n’est plus le cas ».

Dans la foulée de ces remontées d’informations, la sénatrice Laurence Rossignol a écrit le 14 avril à François Braun, le ministre de la Santé, pour demander au gouvernement d’agir « en urgence », rappelant que « le droit à l’IVG doit être garanti ».

L’Otmeds demande que « les sénateurs et sénatrices membres de la commission d’enquête parlementaire sur les pénuries de médicaments et les choix de l’industrie pharmaceutique à se pencher au plus vite sur cette question et cet exemple particulièrement inquiétant » et organise une table ronde sur cette question le 22 avril à 18 h 30 à Paris (voir ici).

Le ministère de la Santé n’a pour l’instant pas réagi à ces interpellations, le sujet ne semblant visiblement pas faire partie de ses priorités.

Aux États-Unis, la pilule abortive est tristement d’actualité aussi et la confusion règne : si le Wyoming est devenu fin mars le premier État à en interdire l’usage et la vente sur son territoire, un juge fédéral du Texas a, lui, publié le 7 avril une décision qui retire l’autorisation de mise sur le marché de la mifépristone au niveau national. La décision a été contestée devant une cour d’appel de la Nouvelle-Orléans par le gouvernement fédéral et suspendue temporairement par la Cour suprême.

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