Le mauvais exemple italien

Olivier Doubre  • 13 septembre 2007 abonné·es

Le Medef en rêvait, Sarkozy l’a promis.
Lors de l’université d’été du Medef, qui s’est tenue fin août, Nicolas Sarkozy a répondu favorablement à une vieille revendication des patrons français : la dépénalisation des délits économiques. La magistrate franco-norvégienne Eva Joly, ancienne juge d’instruction dans l’affaire Elf, s’est immédiatement insurgée contre ce projet du président de la République : « Les méthodes qu’il suggère sont celles de M. Berlusconi. […] Je ne comprends pas un pays qui responsabilise ses enfants et ses fous et « irresponsabilise » ses élites. Cela me paraît une grave erreur et surtout une absence de compréhension de ce que veut dire la criminalité organisée et économique. »

En Italie, en octobre 2001, soit quelques mois à peine après son arrivée au pouvoir, le gouvernement Berlusconi s’était en effet empressé de vider de son contenu le délit de faux bilan comptable et d’en réduire la durée de prescription. Cette loi, quasiment ad personam , avait pour objectif premier d’éviter au Cavaliere une condamnation dans une des affaires concernant la gestion plus que trouble de sa holding, la Fininvest. De fait, dès février 2003, une partie des poursuites contre lui étaient abandonnées dans l’affaire « All Iberian », où il était accusé d’avoir constitué une caisse noire. Puis, en septembre 2005, il était définitivement relaxé par des juges milanais, contraints d’appliquer les nouvelles normes en vigueur…

D’inspiration berlusconienne, l’annonce de cette prochaine faveur faite au patronat français a de quoi surprendre de la part de celui qui défend la « tolérance zéro » pour les petits délits. Le Medef appelait aussi de ses voeux la réduction drastique du délai de prescription des délits. Pourtant, la France est un pays où les sanctions pour délits économiques sont peu nombreuses : en 2005, selon une étude de la Chancellerie, sur 550 841 délits économiques, seules 4 056 condamnations en matière de législation sur les sociétés ou pour atteintes aux finances publiques ont été prononcées. Nicolas Sarkozy ne semble pas prêt à dénoncer le supposé « laxisme » des juges dans ce domaine, à la différence des petits larcins commis par des jeunes de banlieue…

Société
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