La voie de l’arc

Démonstration d’élégance de Vincent Eggericx apprenant le kyudô à Kyôto.

Ingrid Merckx  • 23 décembre 2010 abonné·es

Ce pourrait être une nouvelle voie. Après celles du Tao et du samouraï : la voie de l’arc, ou kyudô. Un art martial au Japon, exercice physique, moral et spirituel tel qu’il n’en existe pas en Occident. Justement : le narrateur de l’Art du contresens a fait le choix de quitter la société occidentale et ses démons personnels pour partir trouver la lumière à Kyôto. Cette quête passe par l’apprentissage du kyudô et s’y concentre : « J’avais le sentiment que, si je m’engageais plus avant dans l’étude de l’arc, j’entrerais dans un chemin où je pourrais me regarder, puis regarder le monde, à la lumière de la lune. »

On pourrait penser le tir à l’arc comme une gestuelle horizontale, guidé par le trajet de la flèche. Au contraire : non seulement il y a deux flèches, l’une tendue vers la cible, l’autre à l’exact opposé – ce qui conduit le narrateur à un développement sur le contresens –, mais, en plus, « il s’agit dans le kyudô de dessiner avec le corps de l’homme des croix dans l’espace, de les animer en une danse lente dont un élément anecdotique et essentiel sera le son produit par l’impact de la flèche sur la cible » .

Cette perception du corps en mouvement, et des gestes comme des énergies qui se rencontrent pour orienter l’arc, réceptacle et révélateur des progrès intérieurs : voici ce qu’il y a de plus dépaysant dans ce roman. Ce n’est pas tant l’île, ses coutumes et ce que le narrateur perçoit de la société nippone, ouverte à l’immatériel, qui captive, ni ce qu’il révèle de ses affres oedipiennes, que sa méditation d’une élégance rare sur les champs de trajectoires.

Culture
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